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Retards importants dans le traitement de leurs dossiers d’exécution de peine, passage destructeur du COVID, directeurs en sous-effectifs souvent désengagés des prisons bruxelloises ayant le focus sur Haren, surpopulation et restrictions liées, grèves récurrentes des agents….

Face à toutes ces illégalités, ces injustices, ces frustrations, ce manque de considération et de reconnaissance de leur qualité d’êtres humains, les prisonniers de Forest ont longtemps fait ce qu’on leur demandait : serrer les dents, patienter, écraser.

Bien sûr, rien n’a changé, sauf en s’aggravant. Il est évident que la règle contenue dans la loi de principes du 12/01/2005 selon laquelle la détention ne peut être que la privation de la liberté d’aller et de venir est une illusion permettant uniquement de légitimer l’institution carcérale.

En prison, le droit légitime de manifester contre les illégalités et incuries de l’Etat n’existe pas.

Ce 26 juillet en matinée, les détenus de l’aile B de la prison de Forest ont demandé aux agents de quitter l’aile pour s’y barricader. Ainsi, par cette action, ils nous ont montré qu’ils étaient toujours debout. Cette révolte, inévitable au vu de la situation qu’ils vivent au quotidien, est un acte de résistance qui leur permet de se sentir encore en vie et de le faire savoir.

Rapidement, les détenus ont accepté, calmement, la discussion et la négociation ; quelques heures plus tard, chacun a rejoint sa cellule.

Ce 27 juillet, un mouvement s’est également enclenché à la prison de Nivelles. Des procédures disciplinaires sont malheureusement en cours contre les « meneurs ».

L’OIP est solidaire des mouvements de résistance des détenus.

L’OIP soutient le droit des détenus à la revendication collective.

L’OIP dénonce la mise en route de procédures disciplinaires liées à ces mouvements estimant que la direction devrait utiliser ce temps pour rédiger les avis nécessaires à l’avancement des dossiers d’exécution de peines (sorties, congés,…) en faveur des détenus.

 

En septembre 1971, les prisonniers du centre correctionnel d’Attica, dans l’Etat de New York, se sont soulevés et ont occupé les lieux pour libérer un petit espace : une zone de liberté temporaire d’où ils pouvaient observer les étoiles : « Malgré l’inquiétude, il y a eu des instants frivoles et même, pour certains, un sentiment de joie inattendu, à ce moment où des hommes qui n’avaient pas respiré l’air frais de la nuit depuis des années ont pu savourer cette étranger liberté. Dans la nuit, on pouvait entendre de la musique, « les frères jouaient de la batterie, de la guitare, du vibraphone, de la flûte et du saxophone ». La plupart de ces hommes n’avaient jamais senti une telle légèreté depuis qu’ils avaient pénétré dans cette prison à sécurité maximale. Cette nuit-là a suscité une profonde émotion chez tous les prisonniers. Richard Clark observait avec stupéfaction ces hommes qui se prenaient dans leurs bras, et il a vu un homme fondre en larmes parce qu’il n’avait pas « eu le droit de se rapprocher de quelqu’un » depuis tellement longtemps. Carlos Roche voyait les larmes d’euphorie qui parcouraient le visage flétri de son ami « Owl », un vieil homme qui était enfermé depuis des années. « Tu sais », dit Owl, émerveillé, « je n’avais pas vu les étoiles depuis vingt-deux ans ». Clark décrira plus tard cette première nuit de rébellion en disant que, même s’il y avait beaucoup d’appréhension sur ce qui pourrait arriver ensuite, les hommes de l’Aile D se sentaient formidables, car « peu importe ce qui se passerait plus tard, ils ne pourraient pas nous enlever cette nuit ». (Heather Ann Thompson, Blood in the Water : The Attica Prison Uprising of 1971 and Its Legacy, extrait cité dans « Capitalisme carcéral » de Jackie Wang).