oip@oipbelgique.be

Bruxelles, novembre 2025

 

Une réponse disproportionnée ? 

 

Dans une communication à ses adhérents, le syndicat CGSP enjoint ceux-ci à se mettre en service minimum continu au sein de la prison de Haren. Ceci à la suite de l’annonce de la direction de cet établissement d’augmenter la capacité de la prison de 43 personnes par l’installation de lits superposés.

Cela veut dire que, si cette mesure est adoptée, une aggravation de l’atteinte grave aux droits fondamentaux des personnes incarcérées sera de mise.

Il faut le reconnaître, celle-ci est à l’amplitude de la détresse des personnes, toutes fonctions confondues, qui exercent un métier au sein de la prison ainsi qu’à celle des services externes qui œuvrent au maintien de la dignité humaine et de la réinsertion.

Le régime proposé durant ce « service minimum continu » sera : un repas chaud  distribué , une seule heure de préau par jour, une seule visite par semaine des proches, accès à la visite avocat, extractions vers le Palais de Justice. Le reste est supprimé ….alors qu’aucun préavis de grève n’a été déposé conformément aux règles qui prévalent en la matière.

 

À un problème non résolu… 

 

La Belgique est confrontée à une crise pénitentiaire chronique, symptôme d’un système judiciaire fondé sur l’enfermement comme réponse réflexe à la précarité, à la marginalité et à la souffrance sociale. À ce jour, plus de 13 000 personnes sont incarcérées dans des prisons conçues pour 11 000, avec un taux d’occupation dépassant les 125 %. Ce sur-enfermement n’est pas un accident : elle est le produit d’un choix politique et judiciaire.

Parmi ces personnes, un tiers sont en détention préventive, c’est-à-dire privées de liberté sans condamnation. Ce chiffre révèle une pratique systémique de privation de liberté qui frappe en priorité les plus vulnérables : personnes sans domicile, étrangères, pauvres, malades. Loin d’être une mesure exceptionnelle, la détention préventive est devenue presqu’automatique, un outil de gestion sociale, un mécanisme de tri et de contrôle.

 

L’enfermement ne protège pas, il détruit 

 

Les prisons belges sont des lieux de violence institutionnelle :

Conditions de vie inhumaines : cellules surpeuplées, matelas au sol, absence d’intimité…

Santé mentale sacrifiée : des centaines de personnes internées sont enfermées faute de structures adaptées, d’autres personnes incarcérées présentent des troubles psychiatriques sévères…

Rupture des liens sociaux : familles brisées, parcours professionnels interrompus, stigmatisation durable…

Soins de santé en deçà de la dignité humaine : aucune préoccupation du pénitentiaire pour les antécédents médicaux des personnes incarcérées, soins contrecarrés par le sécuritaire, des personnes qui ressortent avec d’avantage de problèmes médicaux qu’à leur entrée en détention…

 

La détention préventive ne prévient rien. Elle n’empêche pas la récidive, elle n’offre aucune réparation, elle produit de la souffrance et reproduit les inégalités. Plus que tout, elle ne prend nullement en compte les victimes

 

Un appel à la rupture 

 

Alors que les autorités judiciaires du pays se mobilisent de façon inédite ce vendredi 14 novembre 2025, nous appelons la magistrature à rompre avec la logique punitive et à s’engager dans une transformation radicale de la justice :

 

Refuser l’enfermement comme solution : chaque décision de détention est une violence évitable.

Investir dans les alternatives communautaires : médiation, justice restaurative, accompagnement social.

Reconnaître les causes sociales des infractions : pauvreté, exclusion, racisme systémique.

Soutenir les mouvements abolitionnistes qui œuvrent pour une société sans prisons.

 

Vers une justice réparatrice et émancipatrice 

 

La justice ne doit pas punir, elle doit réparer, écouter, transformer. Elle doit être permettre à chacun.e de vivre en sécurité, ce qui passe non pas par le contrôle mais par le soin aux personnes, dont les victimes et la diminution des inégalités sociales.

Nous enjoignons les magistrats à faire preuve de courage, à refuser l’automatisme carcéral, et à imaginer une justice sans murs, sans cages, sans oubli carcéral…